Les retours ne sont pas toujours faciles et lorsque l’on revient de Neveria, c’est avec une ouïe pour le moins altérée que l’on revient. Le quartier commerçant, magnifique, diversifié mais surtout, terriblement bondé et assourdissant. Elle ne comprendrait jamais comment ses habitants arrivaient à s’y complaire et pourtant, elle devait s’y rendre souvent. Bien trop souvent à son gout d’ailleurs. En ce qui concerne les plantes, c’était sans nul doute le meilleur endroit de tout Asmosa si on omettait toutefois les forêts et prairies qui malheureusement, n’offraient pas toujours ce qu’il lui fallait.

C’était donc en un rapide aller-retour qu’Eilween était rentrée dans sa cité, bien heureuse de ne pas s’être éternisée cette fois-ci. Lors de sa précédente visite, elle avait dû y séjourner deux jours qui lui avaient semblé infernaux avec son manque de transport pour quitter la ville. La maladie et la dérobade avaient été de bien piètres alliers, elle ne se le cachait pas et s’en souvenir, l’ennuyait au plus haut point. Sans compter l’angoisse de sa sœur avec ce retard ! Pour peu elle l’aurait vue en larmes, mais c’était Aveleen et elle ne les montrait que très peu. Si elle avait pu la contacter, elle l’aurait fait cependant, les pigeons voyageurs ne sont plus ce qu’ils étaient et avec les monstres qui rôdent de temps à autre, ou les archers … Elle n’était pas certaine que son message serait arrivé à destination de toute façon …

Au moins, voila qu’elle était de retour à Belvar dans les meilleurs délais ! Cependant, être rentrée ne voulait pas pour autant dire qu’elle pouvait prendre son temps mais on sait tous que se dépêcher fait rarement l’état d’une bonne idée … Il avait plu dans la cité, elle le savait, elle le voyait et pourtant, sur les pavés de cette rue, elle marchait d’un pas rapide. Et puis, dix minutes plus tard, ce qui devait arriver, arriva. La demoiselle glissa sur le sol ce qui ne manqua pas de renverser le sac qu’elle tenait et immanquablement, les bocaux qu’il contenait.

« Mince ! »

Se relevant aussitôt, elle couru à la suite de ses plantes qui roulaient sur elle-même encore et encore. Mais elle y croyait, elle se disait qu’elle pouvait les atteindre alors, elle continuait de se lancer à leur suite jusqu’à ce qu’elle soit tellement absorbée par leur vue, qu’elle en oublia où elle se trouva. La mer se rapprochait inexorablement et bientôt, alors qu’elle se pencha pour attraper l’un de ces bocaux, la demoiselle, à présent au bord de l’eau, commença à perdre l’équilibre. Décidément, les retours de Neveria ne lui apportaient rien de bon …

Voici quelques jours maintenant que le Tigrou était revenu sur les territoires d’Asmosa. Et c’était, comme toujours, un plaisir. Il avait déjà put revoir Flare, son amie de longue date –qu’il continuait de fréquenter dès qu’il en avait l’occasion – et rien n’aurait pu gâcher sa journée, présentement. Les petits marqués commençaient à connaitre la ville et Ritchy, de facto, avait encore décidé de leur laisser un peu de temps libre sans être constamment sur leur dos à la manière d’un instructeur dont le rôle serait davantage de surveiller plutôt que de protéger. Et puis, si vraiment il y avait un problème, il faisait confiance aux gamins pour savoir où s’abriter et quoi faire en cas de problème.

C’est donc tout guilleret qu’il se baladait, les mains derrière la tête, prenant soin d’observer tous ces petits détails qui lui avaient échappés jusque-là, lors de ses dernières visites ou il se devait de garder un œil constant sur ses protégés. De la pierre particulière dont étaient faites les maisons aux étals marchands glissant sur les flancs des rues tels une rivière de merveilles comestibles, rien n’échappait au regard bien plus avisé et détendu du félin Algiz. Et pour couronner le tout, un superbe sourire illuminait son visage d’idiot fini, bien que pour lui, c’était tout à fait normal.

Puis, au détour d’une allée, bien qu’absorbé par ses contemplations, ses oreilles captèrent le son lointain du verre tintant sur le pavé. Et quelle ne fut pas sa surprise de voir, un peu plus loin, la demoiselle mage envers qui il avait une dette ?! Heureux hasard que voici, ceci ne fit que raffermir davantage son hilare expression. Sortant de la ruelle, il voulut l’alpaguer avec sa voix bien à lui mais… Il se rendit compte que la demoiselle courrait déjà bien loin, derrière son bocal.

Qu’à cela ne tienne, Ritchy décida d’essayer de la rattraper. Enfin, il voulait surtout lui éviter de tomber à la renverse dans l’eau car il avait bien vu que la mer se faisait de plus en plus proche, ici. En soit, c’était là une bien délicate attention de sa part !... Sur le papier, du moins. Car, alors qu’il parvint à se mettre à la même hauteur que la demoiselle, il crut bon d’attraper un morceau d’étoffe lui appartenant. Oui, l’idée était bonne. L’application un peu moins.

Plouf.

Le son parvint distinctement aux oreilles du tigre qui se retrouva alors dans un équilibre précaire à son tour. Tellement précaire, d’ailleurs, qu’il termina lui aussi sa course dans l’eau salée. Enfin… Au moins, ainsi il revit Eilween, dans le même état que lui.

« Ah, bonjour, ça fait longtemps ! Comment ça va ! »

Oui, Ritchy démarre une conversation en pleine séance de natation comme si c’était la chose la plus logique du moooonde.

Face à l'eau qui se rapprochait, Eilween ne pensait plus qu'à une chose ou plutôt, elle ne pensait plus à rien ! Se sentant partir, la distance avec la vaste étendue se réduisant rapidement, la belle ferma les yeux. Son sac tenu fermement contre sa poitrine, elle attendait l'impact qui n'était plus qu'une question de temps. Oh elle savait nager, ce n'était pas le problème, mais se voir chuter quand bien même il ne s'agissait pas d'une falaise, avait quelque chose d'impressionnant. Et alors qu'elle ne croyait plus à son salut, des bruits de pas, rapide dans sa direction. Elle y reste accrochée tant qu'elle n'a rien de mieux à faire et puis, finit par y croire ! Elle sent qu'on la retient dans le dos, un pan de vêtement, et elle ouvre les yeux pour mieux réaliser la situation.

Pourtant, elle n'aurait pas dû se faire d'idée car ne serait-ce que quelques secondes plus tard, elle se voyait pénétrer toute vêtue dans la mer dans un « plouf » phénoménale. La tête rapidement hors de l'eau, la brune regarda aux alentours ce qu'il était advenu de ses courses, oubliant l'espace d'un instant que l'on venait d'essayer de l'aider. Cependant, personne ne se trouvait au bord, c'était étrange mais la réalité lui vint rapidement à l'esprit, elle n'était pas la seule à être tombée. Et, la voix derrière elle ne put que confirmer cette certitude.

Bonjour ? Cette personne était-elle sérieuse ? Ce n'était pas vraiment l'endroit pour commencer une conversation mais attendez une minute, ils se connaissaient ? Comme elle le pouvait, la demoiselle se retourna pour voir le jeune homme qui venait de s'adresser à elle pour se rendre compte qu'effectivement, elle l'avait déjà rencontré.

« Heu ... Bonjour ! Effectivement, ca faisait longtemps. »

Elle finit sa phrase sur un sourire, passant par dessus la honte que devait lui évoquer l'état dans lequel elle se trouvait. Au fond, elle était contente qu'il ait tenté de l'aider même s'il fallait bien l'avouer, que cela n'avait pas servit à grand chose comme à présent, ils étaient tout deux trempés. Un bocal flottant légèrement entre eux deux, la brune reposa son attention sur elle-même pour se rendre compte qu'une partie du contenu de son sac venait de lui faire faux-bond. Soupirant désespérément, elle se maudit en cet instant avant de commencer à nager dans la direction de son bien pour finalement repérer d'autres bocaux dans la direction opposée. Pouvait-elle se permettre de demander de l'aider au jeune homme ?

« Pardonnez-moi Ritchy, puis-je vous demander un petit coup de main ? »

Elle lui indiqua alors la direction dans laquelle on voyait flotter les petits objets, un peu gênée de devoir lui demander de l'aide dans pareille situation, avant de récupérer un premier bocal. Tant qu'il ne pleuvait pas, ca pouvait encore aller n'est-ce pas ?

On pourrait au moins dire une chose avérée, entre la pluie qu’il avait eu à essuyer lorsqu’il était avec Flare et ce bain de mer improvisé, le Tigrou était maintenant plus rutilant qu’un chaudron décapé de part en part ! Mais ça l’amusait, lui. Là ou d’autres aurait pesté voir hurlé leur désarroi, Ritchy, lui, affichait, comme à l’accoutumée, un sourire radieux sur ses lèvres encore jeunes. Mais lorsque la demoiselle mage se mit à le vouvoyer, il ne put que rester perplexe, un petit moment.

Ritchy n’avait pas l’habitude d’user de telles marques de politesses. Ça sonnait étrange à ses oreilles pourtant habituées aux pires horreurs. Surtout que pour lui, étant donné qu’il avait déjà parlé avec la jeune femme au moins une fois, de tels manques de familiarités n’avaient plus leurs places entre eux ! Ainsi était le natif d’Ilmyde, sans doute bien trop sociable pour son propre bien ! Mais là n’était pas la question, présentement.

La demoiselle semble avoir cruellement besoin d’aide et en bon gentleman naturel qu’il est, Ritchy doit lui prêter main forte ! Surtout que, c’était plutôt amusant de devoir attraper des bocaux en train de flotter ! Le tigre songeait à garder cette idée dans un coin de sa tête pour y jouer un jour avec les petits marqués, ses protégés. Ce serait surement très sympathique de jouer tous ensembles dans les remous provoqués par les uns et les autres ! Et même que Ritchy demanderait à Eilween si elle voulait venir aussi parce que mine de rien, on s’amuse bien plus quand on est nombreux !

Les bocaux rattrapés avec une certaine agilité, l’expatrié remonta sur la rive et posa les fragiles contenants un à un sur le sol fait de pavés et de briques. Puis, n’ayant pas oublié sa comparse, il voulut, trempé, lui tendre une main secourable pour la sortir de l’eau, à son tour.

« Viens ou sinon, tu vas friper comme une ancienne ! »

Ce n’était en rien méchant, ce commentaire, juste une petite plaisanterie que la mère de Ritchy lui faisait souvent du temps où elle était encore en vie et qu’il avait l’occasion de prendre un bain avec elle. Que de bons souvenirs… C’avait suffi à rendre le visage du tigre encore plus lumineux qu’il ne l’était déjà.

Et ce n’est qu’après qu’il réalisa, bêtement, que dans son autre main était toujours le morceau de tissu arraché à la robe d’Eilween – mais il ne savait pas avec précision d’où il venait, cela dit…

Resté coi devant cette constatation, il ne put qu’afficher un air intimidé et surtout repentant avant de regarder la jeune et jolie mage droit dans les yeux avec ses iris couleur d’argile.

« Je suis vraiment désolé, je crois que ceci est à toi, aussi… »

Il mit donc le morceau de tissu incriminé et tout dégoulinant en évidence, comme si ça pouvait aider en quoi que ce soit…

Le moins que l'on puisse dire c'est que se retrouvée à l'eau, vêtue d'une robe vous arrivant au pied avait quelque chose d'étouffant et nager dans de telles circonstances n'était pas chose aisée. Le tissu lui collait à la peau et rendait son objectif bien plus long à atteindre mais Eilween s'activait aussi rapidement qu'elle le pouvait pour récupérer ses bocaux éparpillé ça et là. Si elle était seule, elle n'en finirai sans doute jamais ! Mais fort heureusement pour elle, aujourd'hui, elle était bien accompagnée.

Elle n'avait d'ailleurs pas terminé de récupérer les deux objets flottants un peu plus loin, que son ami était de retour à la rive, les bras chargés. C'est en entendant, de petits cliquetis sur le sol, qu'elle s'était alors retournées pour le voir les disposer comme il le pouvait, en ligne à l'extrémité du sol pavé face à lui. Ritchy s'était deja extirpé de l'eau alors qu'elle, en était loin encore ! Ainsi dans un dernier mouvement pour récupérer ce qui lui restait, elle le rejoins à son rythme, déposant ses plantes à la suite de celle deja présente avant de vérifier la hauteur la séparant de la terre ferme. C'était certain, dans sa condition, elle n'y arriverait pas toute seule !

Puis, elle remarque la main tendue que lui offre le blond avant de lui sourire timidement. Elle était vraiment dans une situation embarrassante et quand bien même ses paroles auraient pu la vexer quelque peu en autre temps, il n'en était rien aujourd'hui. S'indigner ? A quoi bon. Elle risquerait de rester à l'eau de cette façon même si au fond, elle doutait qu'il la laisse dans pareil pétrin. Elle l'aimait bien Ritchy, même si leur seconde rencontre était aussi particulière que la première. Elle préférait réellement lui sourire en cet instant, il était là au bon endroit, au bon moment. Peu de gens pouvait se vanter d'avoir eu une telle chance !

Pour une raison qu'elle ignore, il finit par fuir son regard, affichant un air maladroit qu'elle ne connaissait que trop bien, et ce n'est que lorsqu'elle vit ce qu'il tenait entre les mains, qu'elle comprit. Avec son aide, elle s'extirpa de l'eau pour rejoindre la terre ferme.

« Merci, vous êtes mon chevalier de la journée ! »

Elle le remerciait d'un large sourire tout en essorant comme elle le pouvait le bas de sa robe. Une fois, puis une seconde avant de tourner sur elle même et de constater l'ampleur des dégâts. Hors de question que sa soeur raccommode son jupon, ce serait juste impossible de toute façon, vu la déchirure qu'elle avait dans dos. Ha ca, elle était belle maintenant ! Mais elle ne lui en tiendrait pas rigueur, ce n'était qu'un vêtement après tout et puis, il avait tenté de l'aider ! Même si ca lui avait valu de finir à l'eau lui aussi. A cette pensée, elle se sentait encore plus désolée.

« Et bien, il semblerait que je doive m'en séparer à l'avenir, dit-elle en parlant du vêtement dont elle tenait l'un des pans pour mettre en évidence l'irréparable zone. Toutefois, je ne sais pas comment vous remercier, je ne m'en serais jamais sortie sans votre aide et d'ailleurs ... Je suis désolée que vous ayez atterri dans l'eau par ma faute vous aussi ... »

Autant, elle avait commence sur un ton presque nonchalant, autant sa phrase s'était terminée avec son visage fixant le sol. C'était sa faute, elle aurait dû faire plus attention, elle ne l'aurait pas entraîné dans sa chute.

Bon, au moins, la demoiselle ne semblait pas lui en vouloir à cause de sa robe, ce qui était une bonne chose ! Ritchy s’en serait voulu si elle avait été en colère contre lui et n’aurait vraiment pas su quoi faire en face d’une telle situation. Heureusement que le destin semblait avoir été suffisamment clément pour lui épargner une chose pareille ! Toujours souriant, le tigre avait toutefois repéré quelque chose d’étrange à ses oreilles. Eilween continuait de la vouvoyer. Pour lui, c’était bizarre dans le sens ou, à l’inverse de Dame Danaëll, l’herboriste parvenait à le mettre en confiance come peu de personnes y était parvenues jusque-là en une seule rencontre. Du coup, le natif d’Ilmyde ne voyait guère l’utilité d’une telle distance entre eux… Mais soit, il allait lui poser la question directement et en fonction de ce qu’il aurait en guise de réponse, il agirait, ou non, comme il pensait le faire depuis le départ.

« On est vraiment obligé de se vouvoyer ? »

Il avait un peu penché la tête sur le côté, interrogatif. Certes, Ritchy n’était pas le plus intelligent ou le plus malin de son espèce –ou même des créatures vivantes- mais il vivait en suivant son cœur. Et justement, son cœur lui disait qu’entre lui et la brunette, il n’y avait pas besoin de mettre autant de titres honorifiques, sinon pour s’éloigner encore plus l’un de l’autre. Étrangement, à cette évocation de perdition, l’algiz eut un frisson le long de sa colonne vertébrale. Ah non alors, il ne voulait pas perdre Eilween ! Elle était gentille, il aimait bien lui parler et il venait juste de la retrouver alors ce n’était pas pour repartir tout de suite, non mais alors !

Alors qu’il allait jauger le nombre de pots de verre à porter pour aider la jeune femme – elle en avait beaucoup tout de même !- l’expatrié percuta quelque chose de mou avec son talon. Se retournant, il se surprit à voir un sac contenant ses anciens vêtements. Ah oui c’est vrai, Flare lui en avait donné des neufs car les siens avaient dû sécher à la chaleur d’un feu des plus plaisants. Bonjour le résultat, il avait fini presque dans le même état que lorsqu’il avait été autrement vêtu !

Cela dit, il eut au moins une idée qu’il trouva excellente ! S’emparant de ses habits secs – même si lui gouttait quelque peu sur les pavés – il les montra tout chiffonné devant Eilween et déclara, le plus joyeusement possible.

« Tiens, prends mes vêtements en attendant de pouvoir rentrer chez toi si tu veux, ils sont secs ! »

Bon, d’accord, ce n’était peut-être pas de la couture de qualité mais c’était mieux que rien, n’est-ce pas ? Et puis Ritchy avait agi avec toute la bonne volonté dont il avait été capable. N’était-ce pas cela, au fond, le plus important ?

Littéralement trempée, l'un des pans de sa robe dans les mains, Eilween ne se rendait pas encore très bien compte de la situation. Encore heureux que son tissus était plus qu'opaque sinon, elle serait dans une situation un peu plus embarrassante qu'actuellement. Pour l'heure, elle était simplement une noble noble avec la stature d'un chien mouillé tel un pouilleux des rues. Et pourtant, elle le vivait bien semble-t-il ou du moins, aussi bien que l'on pouvait si l'on venait de se faire aider tout en ayant, sans le savoir, participé à la chute de notre sauveur. Venant de lui, elle doutait fortement qu'il lui en veuille, quand bien même elle ne l'avait rencontré qu'une seule fois et qu'il lui avait laissé une médaillon en guise de gage. Un très beau bijou d'ailleurs qu'elle avait gardé en sécurité chez elle car quelque part, elle se doutait qu'il s'agissait là, de bien plus qu'une babiole. Il devait avoir une histoire mais également, une valeur sentimentale qu'elle ne voudrait enlever à personne. Pour dire vrai, avant de revoir Ritchy, elle avait presque oublié ... Elle ne voulait pas d'argent et refuserait d'ailleurs tout paiement, elle se l'était jurée ce jour-là alors qu'il était simplement parti.

Elle était restée intriguée, lorsqu'il avait penché la tête pour énoncer son souhait de se tutoyer. La manière formelle l'avait apparemment gênée alors que pour elle, c'était chose normale. Jamais la mage ne se serait permise ce manque de civilité quand bien même, elle n'en suivait que peu. Certaine leçon était faite pour être apprise et restée gravée en mémoire tel le fer rouge de la volonté de sa mère. L'espace d'un instant, elle jugea bon d'y réfléchir mais finalement, ce fut le naturelle qui prit le dessus comme si l'éducation n'était faite que pour être déviée un moment tel que celui-ci.

« Je suis désolée, c'est une habitude, mauvaise sans doute vu comment cela vous dérange. Mais devrais-je te tutoyer maintenant ? »

Alors qu'elle lui posait la question, sourire aux lèvres, le blond inspecta la rangée de bocaux, alignés lors de leur petite baignade improvisée. Qu'avait-il en tête ? Elle se le demandait, après tout, il ne s'agissait que de plantes – pour lesquelles elle avait fini par plonger malencontreusement. Le suivant du regard, Eilween finit par poser les yeux sur un sac sur lequel il cogna la pied. Une chose était sûre, il n'était pas à elle et d'ailleurs, elle ne se souvenait même pas l'avoir entrevu dans sa course au bocal, mais elle pouvait se tromper après tout. Effectivement, il n'étais pas là avant et pour preuve, son chevalier du jour en sortit triomphalement des pièces des tissus totalement chiffonnées. Vêtements qui, tout souriant, il lui proposa d'ailleurs de prendre alors qu'elle les jugeait d'un oeil curieux.

« Qu'est-ce que c'est ? »

La question la plus innocente au monde qui traduisait tellement bien sa curiosité. Elle ne se rendait pas encore compte à quel point cela pourrait être utile sur le coup ou tout du moins, pas jusqu'à ce qu'à ce que le vent ne commencer à se lever, la gelant dans sa robe mouillée. Elle frissonna de fait, ramenant ses mains sur les épaules opposées pour les frictionner rapidement de haut en bas. Le vent se levait doucement et maintenant qu'elle levait les yeux aux ciels, la suite ne semblait annoncer rien de bon.

« Je ne peux pas accepter, lui sourit-elle en refusant poliment d'un signe de la main. »

Lui prendre revenait à le priver de vêtement sec et il ne fallait pas qu'il tombe malade à son tour. Elle se demanda d'ailleurs où était le petit Ja'Far mais n'en fit rien, elle lui poserait la question mais pas maintenant. Quoiqu'elle pourrait confirmer ses dires et le laisser garder son bien sec. D'après ce qu'elle en avait retenu, il n'était pas d'ici et il était difficile pour elle de voir le petit garçon s'occuper de lui en cas de problème. Et dire qu'elle habitait de l'autre côté de la ville, elle n'était pas prête de rentrer elle non plus ....

Apparemment, et malgré la sympathie dont avait fait preuve Ritchy, la jeune mage ne souhaitait pas prendre ses vêtements secs pour se protéger du vent naissant. Pourtant elle devrait ! C’était un coup à tomber malade, tout ça ! Le tigre en savait quelque chose, souvent, plus jeune, il avait voulu jouer les petits chefs sans prendre bien soin de se couvrir et se réveillait le lendemain avec sa maman très inquiète à son sujet et une bonne fièvre en prime ! Du coup, lui-même sentait l’inquiétude commencer à monter dans ses veines. Peut-être avait-elle refusé car il avait été impoli ? Peut-être s’y était-il mal prit, au fond ?

Ah, ça… Ritchy ne savait peut-être pas beaucoup de choses sur le monde qui l’entourait, mais il se savait dépourvu d’une grande ruse naturelle. Même s’il ne le montrait pas et n’y pensait pas souvent, il savait qu’il n’était pas très malin et que, parfois, ses manières ou ses actions pouvaient heurter la sensibilité d’autrui – même s’il ne avait pas vraiment moment expliquer ce phénomène, il est vrai. Alors, il se sentit très bête, le morceau de tissu dans les mains que l’air faisait quelque peu voltiger gracieusement.

Bon, après, il se dit que, de toute manière, s’il avait vexé Eilween, il en était vraiment désolé –parce qu’il l’aimait bien quand même ! – mais que ce n’était pas une raison pour qu’elle attrape la crève comme ça, à être la proie parfaite pour toutes les maladies qui étaient susceptibles de trainer dans le coin ! Tant pis, autant mettre « les deux pieds dans le plat » comme dirait certains, après ce genre de constatations.

Aussi, sans même attendre l’avis de la demoiselle toute en beauté, il s’approcha et lui mis l’étoffe sèche et protectrice sur les épaules avant de se replacer devant elle et de faire une tirade se voulant convaincante.

« Tu sais, ma mère me disait souvent que si je ne me couvrais pas correctement, je finirais par tomber tellement malade que je n’arriverais même plus à reconnaitre mon reflet ! »

Il eut un petit rire solitaire, qui vint pourrir l’image sérieuse qu’il aurait pourtant voulu conserver.

« En plus, Jaf’far m’en voudrait si tu tombais malade par ma faute, tu sais ? Je suis sûr qu’il préférerait te savoir au chaud ! Et puis ne t’en fais pas pour moi, je suis habitué aux conditions difficiles ! Ce n’est pas un petit vent qui va m’impressionner après tout ! »

Comme pour assortir les paroles à un geste, il fit semblant de contracter ses biceps, façon qu’avait certains hommes de prouver leur « force ». Son objectif n’était pas vraiment de faire la morale à Eilween mais plutôt de la faire rire car d’après Ritchy, quelqu’un qui rit sera tout de suite plus réceptif aux paroles et autres conseils d’autrui !

Et puis, soudain, idée de génie qui lui traversa l’esprit ! Comme quoi, parfois, ses deux neurones pouvaient s’allier pour faire surgir quelque chose de bien depuis les tréfonds de son esprit ô combien simpliste et idéaliste. Prenant le sac de toile, désormais vide, il le présenta à la mage incendiaire avant de déclarer, comme s'il avait eu l’idée du siècle ;

« En plus, regarde ! Comme maintenant ce sac est vide, on va pouvoir transporter tees pots de verres bien plus facilement ! Et ainsi, on rentrera plus vite à ta boutique ou tu me diras comment je peux te rembourser pour la dernière fois ! »

D’une logique imparable, selon lui. Oui, effectivement, il avait toujours le mot pour paraitre le plus convaincu qui soit !

A le regarder, la mage à l'impression que l'idée ne lui plais pas plus que ca, mais qu'y peut-elle si elle se refuse à le priver de son propre bien dans son intérêt et celui du petit Ja'Far ? Comme si elle pouvait simplement lui expliquer, qu'elle s'inquiète plus du sort d'un garçon qu'elle n'a rencontré qu'une seule fois plutôt que le sien. D'ailleurs à bien y penser,elle pourrait bien se débrouiller toute seule, en augmentant légèrement sa température corporelle pour lui tenir chaud. Mais elle avoue qu'avec ce vent et ses habits trempés, la tâche était loin d'être simple voire même impossible. Dans tous les cas, elle était simplement incapable de contenir ses tremblements que lui provoquaient ses nombreux frissons et la crédibilité n'était dès lors pas de son côté.

Eilween le voit alors s'approcher d'elle, pour les poser le vêtement sur les épaules sans lui laisser le temps d'agir. Elle se sent bien bête à présent, mais surtout gênée de la situation. L'imaginer était une chose mais la vivre en était une autre et pour le coup, elle se sentait plus gênée qu'avec Killian, aller savoir pourquoi ... Mais au delà de ca, elle était contente et ne manqua pas de lui offrir un petit sourire alors qu'il passait son temps à expliquer le point de vue de sa mère dans des termes qu'elle n'aurait jamais utilisé. Puis, il sourit avant d’enchaîner sur le petit garçon aux cheveux blancs et elle ne peut que restée étonnée de ses paroles à son sujet alors que la suite la fit éclater de rire. Des biceps un peu inexistants dirait-elle mais c'est ce qui rendait la situation plutôt drôle !

« En effet, c'est très impressionnant ! » Répondit-elle tout en laissant échapper son rire.

Non, elle ne pouvait pas être sérieuse face à lui, et avec le mal qu'il se donnait, elle allait garder ces vêtements encore un peu. Des vêtements d'homme certes, d'un goût peu raffiné qu'Aveleen ne prendrait pas même la peine de critiquer, mais partant d'un bon sentiment. Un peu gênée, elle réajusta le tissus sur ses épaules avant de lui poser la question qu'elle avait en tête depuis qu'elle l'avait vu.

« Dis-moi d'ailleurs, comment se porte-t-il le petit Ja'Far ? »

alors qu'elle lui demande des nouvelles du garçon qu'elle avait soigné auparavant, voila que le blond lui présentait son sac de toile avant de lui indiquer qu'il servira pour transporter ses pauvres bocaux. Il est vrai qu'elle aurait dû prendre un sac plus grand elle-aussi en partant à l'assaut de Neveria pour en revenir plus chargée qu'elle n'avait pu y penser en partant. Elle ne pouvait plus refuser maintenant et en plus, c'était là une merveilleuse idée que de pouvoir transporter ses bocaux sans devoir y porter un attention quasi constante. D'un signe de tête, Eilween acquiesça, à l'idée avant de la secouer négativement.

« Ce ne sera pas nécessaire. Si tu m'avais laissé le temps la dernière fois, je te l'aurais dit que je n'y comptait pas. »

Un sourire chaleureux si les lèvres, la jolie mage venait de lui dire qu'elle ne souhaitait aucun remboursement pour la simple préparation qui avait agit comme elle l'avait espérer. Maintenant, elle espérait qu'il se porte bien, ce petit, elle y tenait. C'était sans doute une des première fois où elle avait dû agir d'elle même, et non sous présentation d'un mot du médecin de la ville. Elle en était fière et en se souvenant de l'angoisse qu'elle avait pu ressentir, n'en était que plus heureuse.

« Tu sais que je n'habites pas la porte à côté n'est-ce pas ? »

histoire de vérifier s'il était toujours apte à l'accompagner et d'ailleurs, ele espérait qu'il avait abandonné l'idée de lui verser une quelconque somme. Si c'était le cas, elle demanderait le franc symbolique !

Le tigre était ravi d’avoir fait rire la jeune femme. Plus encore, l’entendre ainsi s’exprimer, l’air ravi, fit même naître des rougeurs sur ses joues, l’espace d’un petit instant. Il n’avait pas bien comprit ce qui venait de lui arriver mais tout ceci était déjà loin derrière lui, à présent. Il se reprit sans mal, un sourire toujours collé sur son faciès de poupon ayant grandi bien trop vite.

Maintenant, il était tout simplement heureux d’avoir pu retrouver cette charmante demoiselle –qui semblait avoir un caractère bien trempé, pourtant de ce qu’il pouvait en voir ! La côtoyer allait être davantage une partie de plaisir ,cette fois, il en était certain ! Il n’y avait pu le facteur stress de la dernière fois et c’était amplement suffisant pour que l’expatrié soit heureux et gai comme pas permis.

D’ailleurs, à l’évocation du nom du petit marqué, le reste des paroles superflues disparu dans l’espace-temps, sans doute, car le blond ne se concentra plus que sur cette question-là.

« Jaf’far va très bien ! Beaucoup mieux qu’avant, il a même gagné en résistance, je crois, et c’est grâce à toi, merci beaucoup, Eilween ! »

Il avait assorti son geste en venant prendre les mains –un peu fraiches à cause de l’eau, sans doute- de la mage, une expression lumineuse sur le visage. Vraiment, il ne savait pas comment la remercier convenablement et mine de rien, ça le tracassait quand même pas mal. Ritchy n’était ni le plus vif d’esprit ni même le plus intelligent qui soit mais il était pourvu d’une qualité majeure ; il avait le sens des responsabilités et était loyal. Lorsqu’une dette lui incombait, avant de passer à « autre chose », il prenait bien garde à ne plus être sous le couperet d’une telle chose. Peut-être était-ce la vie qui, au court de ces deux dernières années – plus particulièrement – lui avait appris ce genre de choses. Ou peut-être était-ce tout simplement inné, chez lui.

C’était tout à fait possible.

Quoi qu’il en soit, l’évocation de la distance jusqu’au foyer de la belle demoiselle ne l’effraya nullement puisqu’il ne fit qu’ouvrir le sac qu’il reprit fermement en main encore plus grand.

« Tu sais, je suis un nomade qui voyage tout le temps sans même m’arrêter donc la distance, ça ne m’effraie pas du tout ! »

Il espérait la convaincre avec ce fait qui, pourtant, ne devait pas constituer quoi que ce soit permettant de se vanter. Mais c’était de cette manière que fonctionnait le tigre et maintenant qu’il avait retrouvé Eilween, il aspirait à passer un peu de temps avec elle, de façon reposante, sans avoir besoin de se ronger les sangs. Et si ça devait alors inclure un service de transport de marchandises d’un point A jusqu’à un point B, alors soit, ça ne posait absolument aucun problème !

Mais il eut tout de même un trait d’esprit certain, ce qui lui poussa à demander, avant de commencer à empiler les pots qu’il pouvait prendre dans son sac de toile ;

« Il y a des plantes plus fragiles ou précieuses que d’autres ? Je ne… m’y connais pas beaucoup donc je ne voudrais pas risquer d’abimer tes biens ! »

Un petit rire nerveux s’en suivit alors qu’il frictionnait l’arrière de son crâne. Il se souvenait de la dernière fois, à la boutique de la jeune mage… Il avait été bien incapable de trouver les plantes nécessaires à la guérison du petit marqué alors tombé malade. Espérons qu’il ne recommence pas une telle démonstration d’impuissance deux fois d’affilée.

Elle qui voulait être sûre que le petit Ja'Far se portait bien, elle n'en était que d'autant plus rassurée lorsque le blond agrandit son sourire ? Il allait bien, même très bien d'après ses propos même si elle doutait un peu que l'on puissant gagner en constitution si rapidement. Mais au moins, l'image était là, il se portait bien et il l'en remerciait alors que pour elle, ca avait été un plaisir quand bien même elle s'était mise dans un état de stress qu'elle n'aimait pas vraiment.

Pour animer ses propos, Ritchy avait attraper ses mains dans les siennes, les secouant légèrement sous sa reconnaissance, encore plus rayonnant qu'auparavant. Cette histoire lui tenait réellement à coeur, tout comme le sort de l'enfant pour lequel la curiosité lui faisait se demander le liens qu'ils pouvaient avoir l'un avec l'autre. Elle avait bien du mal à l'imaginer comme son fils au vue de son âge devant avoisiner le sien mais n'avait pas écarter la piste du petit frère quand bien même, ils ne se ressemblaient pas. Elle ne pouvait pas juger bien évidemment car après tout, lorsque l'on regardait sa soeur et elle, on avait aussi beaucoup de mal à savoir qu'elles étaient de la même fratrie. Si seulement la situation pouvait rester comme ca ...

« Je suis heureuse de savoir qu'il va bien alors ! Ca me rassure. »

Eilween lui sourit sans retenue, complètement rassurée de son état qui lui faisait très plaisir à entendre, elle qui s'était posée la question jusque là. Ensuite, le blond ne releva pas même la question lorsqu'elle lui avait dit ne pas vouloir de remboursement, et ca, ca l'embêtait assez. Elle devra le lui répéter lorsqu'elle sera rentrée parce qu'apparemment, il y tient et d'ailleurs, il ne manque pas de lui faire remarquer son caractère nomade qui l'oblige à voyager sans cesse. La distance ne semble pas lui faire peur, sans doute ne le dérangerait-il pas plus que ca de l'accompagner alors. Malgré tout, la mage ne voulait pas forcer les gens à lui venir en aide, mais elle pouvait être rassurée cette fois, non ?

« Et bien si ca ne te dérange pas, d'accord ! J'ai des amis qui voyagent beaucoup aussi tu sais ? »

Entre Jolhane, Meryl et Killian, elle devait bien dire que les voyageurs, elle connaissait un peu ce qui lui rappelait d'ailleurs à quel point elle pouvait être seule parfois lorsque sa soeur n'était pas là. Encore heureux qu'ils n'apparaissaient, ni de disparaissaient pas tous en même temps d'ailleurs, ce qui ne manquerait pas de renforcer ce sentiment. Alors, elle lui sourit de nouveau, prête à faire un bout de chemin en sa compagnie tandis qu'il commence à empiler ses biens à l'intérieur de son sac.

Elle alla l'aider aussitôt, elle ne pouvait simplement pas le laisser faire tout le travaille tout seule alors qu'il était deja bien assez gentil que pour lui prêter ses vêtements et l'accompagner jusque chez elle. Non, elle ne pouvait décemment pas profiter de son amabilité. La brune déposa son premier bocal puis s'étonna de la demande de son sauveur.

« Si je devais être objective, je dirais qu'elles sont toutes aussi importante les unes que les autres même si j'avoue que pour l'instant le saule et ces deux bocaux ici sont assez indispensable, lui dit-elle avant de lui glisser à mi-mot. En fait, je n'en ai plus. »

Elle le rassurait en rigolant quelque peu à la fin de sa phrase. Il avait cette manie de se gratter la tête lorsqu'il était embêté qu'elle trouvait adorable. Ritchy était décidément une personne comme elle en connaissait peu, prêt à aider son prochain tout comme il avait peur de mal faire. Quelque part, elle n'était pas si loin mais rencontrer quelqu'un tel que lui avait quelque chose de particulier et alors quelle s'était mise à le fixer sans s'en rendre compte, un élément la ramena à la réalité. Une goutte d'eau venant de s'abattra sur son front, ne manquant dès lors pas de la faire cligner des yeux instants avant qu'elle n'en vienne à regarder le ciel.

La pluie commençait à s'abattre lentement, mais sûrement sur la ville ne manquant pas de faire perdre son sourire à la mage qui espérait que cela ne se produise pas, depuis son arrivée. Alors, elle accéléra le pas, empilant rapidement les bocaux restant à mesure que les gouttes d'eau se faisaient de plus en plus violentes. Il ne manquait plus que ca ...

Le sourire de Ritchy ne l’avait pas quitté depuis tout à l’heure. Bon, il était trempé et avait bien piètre allure, mais qu’importe, il avait connu pire ! La simple présence d’Eilween lui permettait d’oublier tous les détails alentours.

Ca l’intriguait, une telle emprise sur lui, mais il n’aurait su se concentrer davantage dessus, il ne le pouvait pas ! Lorsqu’il réfléchissait de trop, il avait tendance a sombrer dans de profondes pensées et réflexions, s’isolant un peu du monde, sans le vouloir. Ce n’était arrivé que quelques fois et les enfants qu’il protégeait l’avaient toujours ramené à la réalité avec plus ou moins de douceur – ça dépendait si une bagarre avait éclaté au sein du petit groupe ou non. Du coup, il ne tenait pas à laisser l’herboriste « seule » avec lui en bon benêt en train de trop accorder d’importance à des choses ô combien volatiles !

La voix même de la jeune femme apaisait ses craintes. Au moins, elle ne le fustigeait pas lorsqu’il tentait de rendre service, bien au contraire ! Elle semblait même ravie de pouvoir compter sur sa personne ! Peu de gens auraient ainsi accordés leur confiance aveugle envers un jeune homme à l’air tout sauf débrouillard. Et pourtant, s’ils savaient tous ô combien Ritchy faisait tant et tant d’efforts pour accomplir tout ce qu’il faisait du mieux qu’il était possible de le faire ! C’était encore un adolescent, oui, mais qui avait dû trop vite grandir par la force des choses. Aujourd’hui, malgré son apparence fragile – comparé à la plupart des autres algizs mâles (et certaines femelles, aussi…) il n’était pas vraiment ce qu’on pouvait appeler un individu qui en imposait – il savait gérer des situations compliquées, comme élever des enfants, par exemple. Qui pouvait se targuer de faire aussi bien que lui alors qu’il n’avait fait qu’apprendre sur le tas ?

Soudain, une goutte d’eau interrompit le festival de ses pensées, de même que les activités des riverains alentours. Ah, il ne manquait plus que ça ! Ça tombait fort mal, en plus, ils se trouvaient encore bien loin du magasin de la demoiselle ! Et l’averse s’annonçait bien rude, en plus de ça. Alors, sans vraiment s’arrêter sur des détails, le tigre prit le sac remplit de bocaux sur son épaule – l’avantage d’être un non-homme, sans aucun doute !- et s’empara du poignet de la brune avant de courir vite jusqu’au phare, qu’il savait vide une bonne partie de la journée. Comme quoi, avoir des oreilles qui trainent partout, même sans le faire exprès, ça pouvait se révéler utile, de temps en temps !

Parvenu jusque-là, il referma la porte derrière lui et se secoua un peu lui-même.

« Bwah, quelle pluie ! Au moins ici, nous serons à l’abri le temps que l’accalmie n’arrive ! »

Puis, une interrogation lui fit connecter plus de deux neurones ensembles.

« Eilween ! Tu n’as pas trop froid ? Ca va aller ? On peut peut-être trouver quelque chose pour te réchauffer ici, si tu veux ! »
Toujours à vouloir bien faire… Ritchy, tu deviens fatiguant à la longue !